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22 juin 2023
Immobilier neuf à Nantes : face à la crise, les promoteurs multiplient les rabais
Avec des ventes dans le neuf en baisse de 67 % dans la métropole nantaise au premier semestre 2023, plusieurs promoteurs immobiliers actifs localement commencent à proposer des réductions, parfois substantielles, sur leurs lots pour boucler la commercialisation de leurs programmes.

Dans leurs courriels publicitaires ou directement sur leurs sites web, nombreux sont les promoteurs à annoncer des opérations inédites pour soutenir l’attractivité de leurs programmes. Frais de notaire offerts et 3 000 € de remise par pièce, rabais jusqu’à 30 000 €, 44 000 € voire 50 000 € mis en avant même par des promoteurs de standing dans des secteurs tels que le Pré-Gauchet ou l’Île de Nantes : les offres se multiplient, et leurs durées de validité tendent à s’allonger (parfois jusqu’au 31 août, pour des opérations livrées fin 2023).  

« Plus de douze mois en moyenne » désormais nécessaires pour commercialiser de nombreux programmes  

Une situation évidemment à imputer à la poursuite de la hausse des taux d’intérêt, qui ampute toujours plus la capacité d’emprunt des ménages et complexifie leur accès au marché du neuf. Alors qu’il y’a encore 1 an, quelques semaines ou quelques mois suffisaient pour commercialiser entièrement la majorité des programmes, ce délai atteint désormais « plus de douze mois en moyenne » selon Patrick Pailloux, délégué régional de la FPI des Pays de la Loire, qui rassemble cinquante promoteurs et sept banques. 

Un contexte de marché inédit qui pousse certains acteurs à « vendre coûte que coûte, quitte à vendre à perte », selon le professionnel, et à cette fin à faire évoluer leurs pratiques en proposant sur des programmes déjà lancés des offres de ce type, en général accordées en amont d’une opération (cuisine ou frais de notaire offerts, réduction de quelques milliers d’euros) afin de permettre aux promoteurs de parvenir au seuil traditionnel de 35 % de précommercialisation. Un seuil réhaussé, dans le contexte actuel, à « 50 %, avec des offres de prêts acceptées », selon Patrick Pailloux.  

Des ventes en baisse de 67 %  

Selon les professionnels, ces stratégies tarifaires inédites relèvent d’un « réflexe de pérennité. Les promoteurs se sont engagés auprès de l’architecte, de la maîtrise d’œuvre, des entreprises avec qui ils ont passé commande… Ils se doivent de continuer la commercialisation », aux termes de l’un d’eux. 

Selon Delphine Marie-Jacob, déléguée générale du Club de l’immobilier de Nantes-Atlantique (Cina), « les notaires annoncent une baisse de 40 % des actes notariés ». Dans le neuf en particulier, la baisse des ventes atteint 67 % dans Nantes métropole au premier trimestre 2023 par rapport à 2022. Une conjoncture « extrêmement pénalisante » selon Patrick Pailloux, qui souligne que « Derrière une opération qui ne se lance pas, c’est tout un marché du locatif privé qui va se tendre, faute d’offres de logements. Des territoires vont se retrouver en difficulté », rappelant aussi que, par ailleurs, les promoteurs construisent « 70 % des logements sociaux » 

Mais ces réductions atteignent-elles réellement leur cible, alors que les taux de crédit continuent d’augmenter ? Selon le délégué régional de la FPI, ces initiatives « peuvent contribuer à améliorer la capacité d’emprunt, sans tout résoudre », citant l’exemple d’un « couple ayant acheté 250 000 € un appartement il y a deux ans « qui, selon lui, « pourra toujours le faire aujourd’hui », mais au prix de concessions importantes : « Une capacité d’emprunt réduite, c’est une pièce en moins. Ou un achat en périphérie, supposant d’exploser son budget transport et son bilan carbone ». 

Voisin de 1 % il y a un an, le taux d’emprunt est passé à 3,6 % actuellement et devrait atteindre « 4 % cet été », selon Delphine Marie-Jacob, d’où une « perte de capacité d’emprunt de 20 % à 30 % par rapport à 2022 ». Ce repli des ventes dans le neuf impacterait par ailleurs déjà, selon la FPI Loire-Atlantique, les mises en chantier, les promoteurs préférant pour l’heure attendre avant de lancer des opérations. 

  

Dans le neuf, des prix encore en hausse 

Malgré ces offres promotionnelles, les prix des logements neufs restent pourtant orientés à la hausse : Entre le quatrième trimestre 2022 et le premier trimestre 2023, dans Nantes métropole, cette hausse a atteint 2,9 % selon l’Observatoire du logement neuf des Pays de la Loire. Sur une période plus longue, du premier trimestre 2022 au premier trimestre 2023, l’augmentation est même de 5,4 %.  

De plus, les propriétaires occupants ne sont pas les seuls à différer leur projet du fait de la hausse des taux : la dynamique est même plus marquée, avec – 71 % de ventes au premier trimestre 2023 sur la métropole. Exemple avec un investisseur se positionnant, avec le dispositif Pinel, sur un deux-pièces. Selon Bertrand Mours, de l’Oloma (Observatoire du logement neuf des Pays de la Loire), « s’il fait un effort d’épargne de 300 € par mois », avec les taux actuels « il le double », indique-t-il. Seulement, selon lui, investir « 3 600 € de plus par an va le faire renoncer à son acquisition ». Des logements aux loyers plafonnés qui devraient donc très prochainement manquer sur le territoire.  

  

Des rabais importants… qui n’effacent pas les conséquences de la hausse des taux 

Selon les experts du secteur, la majorité des réductions proposées par les promoteurs ne suffisent cependant pas à contrebalancer les impacts de la hausse des taux sur leur pouvoir d’achat : selon un courtier actif à Carquefou-Orvault, un couple ayant un revenu de 4 500 €, et donc en mesure de s’acquitter d’une mensualité de 1 500 €, pouvait avec un taux à 2,5 %, acheter un bien à 334 000 €, frais de notaire compris. Or, avec un taux à 3,6 % aujourd’hui, « son budget ne serait plus que de 296 000 € », soit une capacité d’emprunt amputée de 38 000 €.  

D’après ce professionnel, les offres proposées par les promoteurs ne s’avéreraient donc attractives peuvent qu’à condition de bien cibler le logement (emplacement, prestations) et de profiter des réductions les plus importantes. Selon le courtier, dans l’hypothèse de taux à 4,5 % en fin d’année 2023, la même capacité d’emprunt diminuerait encore de 38 000 € supplémentaires. Un constat qui mène l’expert à souligner qu’avec des « taux […] à 3,3 %-3,6 % sur 25 ans, qui vont continuer à augmenter, […] c’est encore le moment d’acheter. Et il faut le faire maintenant, plutôt que dans six mois ». 

Source : Ouest France / Reproduction interdite 

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