Discours de Manuel Valls au 68e Congrès de la FNAIM
Madame la ministre,
Monsieur le président, cher Jean-François BUET,
Mesdames, messieurs,
Vous toutes et vous tous le savez aussi bien que moi : le logement, ce n’est pas un secteur comme un autre de notre économie. C’est d’abord, un enjeu de société. Pouvoir se loger de façon décente, c’est en effet fondamental pour avancer, pour obtenir un emploi, pour construire sa vie, sa vie personnelle, sa vie de famille …
Or, la réalité est là : nombreux sont les Français qui souffrent d’être mal-logés. Nous, les élus, et plus encore les élus locaux, mesurons pleinement les difficultés de nos concitoyens.
Ils consacrent près du quart de leur budget au logement. Ce poids dans les dépenses a doublé depuis les années 1970, et plus encore pour les Français les plus modestes. Il est souvent insupportable pour les familles, pour les jeunes. C’est une source d’inquiétude, d’angoisse, voire de découragement.
Certes, toutes les régions ne connaissent pas la même tension … il y a des zones où les prix sont moins élevés et où il est moins difficile de se loger qu’ailleurs. Il n’en reste pas moins que l’engagement de tous les acteurs de l’immobilier est nécessaire.
Nécessaire pour loger nos concitoyens, mais aussi pour relancer notre économie. Le logement, c’est un moteur puissant au service de la croissance, c’est un secteur qui offre un gisement d’emplois. D’emplois non délocalisables.
En répondant à votre invitation – je crois que c’est la première fois pour un Premier ministre – je voulais vous redire, à vous professionnels de l’immobilier ma confiance. Car vous êtes, vous aussi, des acteurs de cette confiance sans laquelle le marché du logement ne peut fonctionner.
Je voulais, aussi, vous inviter, une fois de plus, à la mobilisation pour que nous puissions, chacun à notre niveau, améliorer le fonctionnement du marché de l’immobilier. Et donc améliorer les conditions de logement des Français. Car leur attente est grande.
1- Le logement, priorité du Gouvernement
Dès mon arrivée à Matignon, j’ai ainsi fait du logement une priorité, avec la mise en œuvre, cet été, en lien avec Sylvia PINEL, d’un plan de relance. Je veux, rapidement, rappeler les grandes lignes de la politique qui est menée.
D’abord, un effort très important en direction du parc social, car il a un rôle essentiel à jouer pour répondre à la demande. Toutefois, il ne peut pas tout.
Nous agissons donc également sur le parc privé, en améliorant les modalités d’aide à l’accession à la propriété pour les ménages modestes, ou encore en favorisant l’investissement locatif via le dispositif PINEL. Il permet dorénavant aux investisseurs de choisir de s’engager pour des durées de 6, 9 ou 12 ans. La possibilité est également donnée de louer à ses ascendants ou descendants. Par ailleurs, l’avantage fiscal pour les SCPI sera aligné sur celui des particuliers.
Une des clefs de la relance de la construction et du logement, c’est bien évidemment la mobilisation du foncier, aussi bien public que privé. Pour ce dernier, les plus-values de cessions des terrains à bâtir bénéficieront d’un abattement fiscal.
Toutes ces mesures ont déjà commencé à produire des premiers effets. C’est une bonne nouvelle ! Mais, pour que la construction redémarre pleinement, il faut que l’ensemble de la chaîne du logement se dégrippe.
En effet, pas d’achat neuf sans possibilité de revente des logements anciens.
Pas de reprise de l’investissement locatif non plus, sans visibilité sur les conditions de location.
Enfin, pas de travaux d’amélioration – notamment en matière de performance énergétique – sans préparation des décisions de copropriétés, ni définition d’un cadre pour la conduite des travaux.
Il faut donc sur tous ces sujets apporter de la sérénité et de la constance à chacun des acteurs.
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A court terme, nous devons lever toutes les incertitudes qui allongent les processus de décision, et qui retardent les mises en œuvre de projets.
C’est le sens des mesures de simplification contenues dans le projet de loi porté par Thierry MANDON et qui concernent notamment les ventes immobilières.
Une fois promulgué, ce texte sera suivi d’une ordonnance du gouvernement pour simplifier les transactions. Une des évolutions envisagées consistera à sécuriser la remise des documents par voie dématérialisée.
Ces mesures vont faciliter la mise en œuvre des dispositifs d’information des acquéreurs, alléger et accélérer le processus de remise des documents. Elles devraient permettre également d'alléger les frais de reprographie et de notification des actes.
Une simplification est également envisagée pour les transactions concernant uniquement les lots secondaires d’habitation comme les garages et caves, traités actuellement à l'identique des lots d'habitation.
Tout ceci c’est du concret. Et c’est ce dont nous avons tous besoin pour avancer.
Simplifier, c’est aussi s’assurer que les règles sont comprises par les deux parties. Les professionnels que vous êtes ne doivent pas se nourrir de la complexité de notre réglementation. Votre rôle – et vous le savez – c’est d’apporter un vrai service aux acquéreurs, aux vendeurs, aux bailleurs et aux locataires.
Vous pouvez compter sur le Gouvernement pour mener cette démarche de simplification, qui va s’enrichir de vos propositions. Vous avez commencé à le faire dans le cadre du Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilières, le CNTGI.
2- Des métiers indispensables au bon fonctionnement du marché immobilier
Pour que la politique menée par le Gouvernement soit pleinement efficace, il faut que l’ensemble des acteurs s’implique fortement. Que vous vous impliquiez fortement.
La fluidité du marché, la sécurité des transactions, le bon entretien du parc privé, l’amélioration de sa qualité dépendent de votre action.
Tous vos clients seront d’autant plus enclins à se tourner vers vous que vous leur offrirez un service de haute qualité et dont le prix sera justifié. Internet et les nouvelles technologies vous permettent de réduire vos coûts. Et vos clients doivent en être les premiers bénéficiaires.
Votre expertise doit aussi contribuer à une information fiable et complète sur les loyers. Votre organisation s’est engagée dans la construction des observatoires de loyers. Je sais que vous avez dû dépasser les réticences de certains de vos confrères qui liaient la mise en place de ces observatoires à un blocage des loyers …
Mais il ne s’agit pas de bloquer, mais d’encadrer. Les mots ont un sens !
Vous toutes et vous tous savez, mieux que personne, que c’est à l’arrivée de nouveaux locataires que les loyers augmentent. Il s’agit donc d’éviter les excès en régulant le marché, c’est-à-dire en faisant en sorte que les nouveaux loyers n’augmentent pas trop par rapport aux précédents. C’est ainsi que l’on freinera une hausse qui pénalise tout le monde. Qui pénalise les locataires, bien évidemment, qui voient leur pouvoir d’achat baisser d’autant. Mais qui pénalise, aussi, les bailleurs qui n’investiront pas s’ils n’ont pas l’espoir de trouver des locataires solvables.
Profitons de la mise en place de ce dispositif à Paris, là où il se justifie le plus, pour en tirer des enseignements de manière pragmatique.
Cette connaissance des loyers et des prix est utile au Gouvernement, aux collectivités locales. Mais, elle sera également pour vous une aide précieuse dans vos négociations avec les bailleurs et avec les locataires.
Je sais, par ailleurs, que votre organisation souhaite promouvoir un projet de bail solidaire. Il permettrait à un bailleur s’engageant à louer à un prix inférieur au marché de bénéficier d’avantages fiscaux. C’est une idée à creuser. Nous ne pourrons le faire qu’avec une connaissance fine des loyers pratiqués.
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C’est un même souci de pragmatisme qui nous a incités à prendre le temps d’étudier le projet de Garantie universelle des loyers. Aider tous les locataires à accéder au logement, c’est un objectif qui peut tous nous réunir. Mais le dispositif n’était pas au point. Son coût aurait été considérable, et sa généralisation problématique.
En revanche, nous avons instauré pour les étudiants un système de garantie locative – la CLÉ – qui fonctionne depuis cet automne sur l’ensemble du territoire. Nous sommes en train également de mettre en place avec Action Logement un dispositif de caution solidaire qui sera destiné aux jeunes salariés, aux salariés précaires, ainsi qu’aux locataires en intermédiation locative. Le dispositif est plus ciblé, mais il permet un système efficace et abordable vers ceux qui en ont le plus besoin.
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Au-delà des transactions et des locations, vous êtes également impliqués dans la préservation de l’état du parc de logements.
En tant qu’administrateurs de biens et syndics de copropriété, vous devez assurer cette tâche souvent difficile, parfois ingrate, mais essentielle pour la qualité de vie. Les attentes sont grandes : rigueur, exigence, maîtrise des coûts.
Les copropriétés sont des communautés humaines dont la vie n’est pas toujours exempte de conflits. C’est particulièrement vrai quand des décisions doivent être prises et que locataires et propriétaires vivant dans un même immeuble s’opposent.
Dans les quartiers difficiles, la spirale de dégradation entraîne certains immeubles vers la catastrophe sociale. C’est ce que l’on appelle pudiquement les « copropriétés en difficulté ». Vous avez alors un rôle encore plus important à jouer. Les pouvoirs publics comme les habitants de ces immeubles doivent pouvoir compter sur vous.
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Je sais que vos métiers ne sont pas simples, que vous êtes régulièrement critiqués.
Les difficultés que rencontrent nos concitoyens en matière de logement créent chez eux une inquiétude forte, qui génère souvent de la méfiance à votre égard. Il n’est pas rare que vous soyez tenus responsables de toutes les difficultés qu’ils rencontrent.
Etre inattaquable vous demande donc d’être irréprochable.
Je note d’ailleurs que le plafonnement des honoraires de location – dont vos clients ont pu en bénéficier dès le 15 septembre – a reçu un écho très favorable dans l’opinion.
Bâtir une relation commerciale durable impose certaines règles : des prix maîtrisés, transparents, affichés. Comme pour toute offre de service, vos clients doivent pouvoir faire jouer la concurrence. La concurrence, c’est la condition, mais aussi l’attrait de cette fonction de chef d’entreprise à laquelle vous êtes – et je le comprends – très attachés.
La loi ALUR vous permet de conduire vous-même des changements. C’est une occasion à saisir !
3- Prendre en main l’avenir de vos professions
Cher Jean-François BUET,
Vous le dites souvent, vos métiers sont en constante évolution. Le développement des réseaux et des franchises a transformé votre secteur. Ce qui vous oblige à évoluer, à progresser. La FNAIM a toujours fait en sorte d’améliorer la compétence de ses membres et d’imposer une exigence pour votre métier. Vous vous êtes attachés aussi à vous doter d’outils performants, car vous savez pertinemment que quand un agent immobilier déçoit un client, c’est toute la profession qui est impactée.
La liberté du commerce ne doit pas servir à couvrir ceux qui mettent leurs clients en difficulté. Je veux vous le dire avec la plus grande force : nous sommes à vos côtés pour lutter contre cette concurrence déloyale qui fait tant mal à votre profession.
Avec la création du CNTGI, la loi ALUR vous donne le pouvoir, en concertation avec les représentants de vos clients, les associations de consommateurs, de donner des avis sur les projets de règlement qui vous concernent. Et surtout – et c’est le plus important – elle vous donne la possibilité de proposer au Gouvernement les réformes que vous pensez nécessaires. Celles qui seront retenues s’imposeront alors à tous.
Le CNTGI, dont nous avons confié la présidence à Bernard VORMS – spécialiste éminent et incontesté – s’est mis au travail très rapidement et a déjà fait plusieurs propositions
La première concerne le contrat-type de syndic.
La ministre du Logement prépare sur ce sujet un décret pour le 1er trimestre 2015, mais le CNTGI se prononcera avant la fin de cette année. Il définira les prestations pouvant faire l’objet d’une facturation particulière, au-delà du forfait inclus par le contrat. Ce Gouvernement est donc pragmatique et à l’écoute.
Nous attendons maintenant vos propositions sur le code de déontologie et sur la formation, initiale et permanente.
Je sais, monsieur le président, que cette question vous tient particulièrement à cœur, et l’Ecole supérieure de l’immobilier que vous avez contribué à créer le démontre pleinement. Qu’elle soit initiale ou permanente, la formation est une chance, pas une contrainte
Je n’ai pas à vous en convaincre, je le sais. D’ores et déjà, vous avez trouvé un accord avec les associations de consommateurs. Le maintien de la carte professionnelle sera d’ailleurs conditionné au respect des obligations de formation. Et vous avez raison !
La création du CNTGI vous permet de prendre en main l’avenir de vos professions. C’est un changement considérable. Je sais que vous l’appeliez de vos vœux. A vous tous, à nous tous d’en faire une structure utile et efficace.
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Mesdames, messieurs,
En étant parmi vous, aujourd’hui, je voulais – je l’ai dit – vous faire part de ma confiance. Le rôle du professionnel de l’immobilier, c’est de fluidifier et de sécuriser les relations commerciales. Et le rôle de l’Etat, c’est d’être le garant du bon équilibre entre tous les acteurs.
La complexité du secteur du logement, c’est que sa bonne marche repose sur de très nombreux intervenants : l’Etat, les collectivités locales, les bailleurs, les acteurs publics, comme privés. Et avant le moment où vous intervenez, il faut que tous ces acteurs aient réussi à se mettre d’accord et à travailler ensemble.
Il ne peut y avoir de remise de clefs si l’on a pas agi sur les procédures d’urbanisme, sur le foncier, sur les conditions de la construction, sur le financement, mais aussi sur les aides pour les locataires, et sur les règles qui donnent confiance aux propriétaires pour louer.
Vous intervenez donc à la fin d’un processus, et vous l’avez bien compris : mon gouvernement est déterminé à agir sur chaque étape, pour lutter contre la crise du logement, pour vous permettre ainsi d’exercer vos métiers. De les exercer de manière performante.
Je compte donc sur votre implication pour toujours mieux loger nos concitoyens.
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