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10 juin 2025
Rénovation énergétique : entre cafouillage politique et outils défaillants, les Français perdent le fil
En matière de rénovation énergétique, les Français peinent à s’y retrouver. Cette semaine, deux annonces successives sont venues renforcer le flou autour d’un sujet pourtant crucial : la suspension temporaire de MaPrimeRénov’, l’aide publique majeure pour les travaux de rénovation, et la publication d’un rapport accablant de la Cour des comptes sur les nombreuses failles du Diagnostic de performance énergétique (DPE), censé guider la transition énergétique des logements. À la clef : confusion, incertitude et inquiétude pour les particuliers.

MaPrimeRénov’ mise sur pause cet été 

Victime de son succès, MaPrimeRénov’ se voit suspendue temporairement. Le journal Le Parisien a révélé le 4 juin que l’aide, versée par l’Anah, serait interrompue dès juillet, faute de budget suffisant. L’information a été confirmée dans la foulée par Valérie Létard, ministre déléguée au Logement, qui a annoncé la fermeture estivale des dépôts de dossiers pour les travaux individuels (rénovation globale, isolation, changement de chauffage). Seuls les projets en copropriété restent éligibles pendant cette période. 

Le gouvernement assure une réouverture du dispositif en septembre, accompagnée d’un plan de gestion des flux et de détection des fraudes. Les dossiers déposés avant la fermeture, s’ils sont jugés non frauduleux, seront bien traités et payés dans les meilleurs délais, avec une accélération prévue de l’instruction. 

Un DPE toujours aussi peu fiable 

Au même moment, la Cour des comptes a publié un rapport sévère sur le DPE, outil fondamental de la politique de rénovation énergétique. Si l’institution reconnaît des avancées, elle pointe de graves lacunes : fiabilité discutable des diagnostics, confusion réglementaire, manque de coordination avec les règles de copropriété et d’urbanisme, et absence de voies de recours efficaces pour les particuliers en cas de contestation. 

La Cour note que, quatre ans après la réforme du DPE, l’interdiction progressive de louer des « passoires énergétiques » n’a pas suffisamment anticipé les difficultés rencontrées par les ménages. En cause, des échéances mal comprises – comme celle du 1er janvier 2025 –, un flou entre DPE individuel et collectif, et des erreurs fréquentes liées à la formation hétérogène des diagnostiqueurs, au temps d’évaluation limité, ou encore au manque de justificatifs techniques. 

Des pistes pour rétablir la confiance 

Face à ces constats, la Cour des comptes formule plusieurs recommandations. Elle appelle notamment à renforcer l’information du public sur les types de DPE et les recours possibles, à mettre en place dès 2025 des contrôles statistiques poussés via l’Ademe, et à créer d’ici fin 2026 une carte professionnelle pour les diagnostiqueurs, gage de qualité et de transparence. 

Elle insiste également sur la nécessité de mieux articuler le DPE avec les réglementations existantes en copropriété et urbanisme, afin de lever les blocages sur certains projets de travaux. 

Un outil contraignant mais encore flou 

Pour rappel, le DPE, réformé en 2021, est aujourd’hui opposable dans les ventes et locations. Il impose des interdictions de louer les logements classés G à partir de 2025, F en 2028, et E en 2034. Valable dix ans, il attribue à chaque bien une notation énergétique de A à G, accompagnée d’estimations de consommation, d’émissions de gaz à effet de serre, de zones de déperdition thermique, ainsi que de recommandations non contraignantes. 

Entre la suspension d’un dispositif jugé essentiel et les failles persistantes du DPE, les signaux sont pour le moins brouillés. Si la volonté politique de massifier la rénovation énergétique est affichée, elle reste entravée par une instabilité réglementaire et des outils mal maîtrisés. Clarifier, stabiliser, informer : autant de chantiers urgents pour ne pas décourager davantage les Français. 

 

Source : Les Echos / reproduction interdite 

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