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09 oct. 2025
IFI : un tribunal valide une stratégie de réduction jugée « audacieuse »
Le tribunal judiciaire de Compiègne a rendu, début septembre, une décision remarquée en matière d’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Pour la première fois, un juge s’est prononcé sur l’application du dispositif anti-abus propre à cet impôt, donnant raison à un couple de contribuables qui avait recouru à un montage via des sociétés civiles immobilières (SCI) pour organiser la transmission de son patrimoine.
Une stratégie patrimoniale sous surveillance
La création de SCI pour détenir et transmettre un patrimoine immobilier est une pratique courante. Mais lorsqu’elle s’accompagne d’emprunts ou d’avances en compte courant d’associés susceptibles de réduire la valeur taxable à l’IFI, l’administration fiscale y voit souvent une manœuvre d’optimisation abusive.
Depuis 2019, l’article 973 du Code général des impôts limite la déduction de ces dettes aux cas où le contribuable prouve que le prêt n’a pas été contracté dans un « objectif principalement fiscal » – une notion floue, source de contentieux.
Transmission du patrimoine : un motif jugé légitime
Dans l’affaire jugée à Compiègne, un couple d’agriculteurs avait créé deux SCI pour regrouper ses biens et préparer leur transmission à leurs enfants. L’administration y voyait un montage destiné à réduire la base imposable à l’IFI.
Le tribunal a pourtant considéré que l’objectif de transmission constituait une motivation patrimoniale suffisante, même si la donation-partage des parts n’avait eu lieu que trois ans après la création des sociétés.
Les juges ont ainsi annulé un redressement fiscal de plus de 12 000 euros, estimant que le différé de transmission s’expliquait par des circonstances personnelles et sanitaires, et que la réduction d’IFI obtenue demeurait marginale au regard des frais de cession et de donation.
Une jurisprudence encore fragile
Cette décision, la première du genre sur le « mini-abus de droit » en matière d’IFI, est accueillie favorablement par les fiscalistes, qui y voient une reconnaissance du caractère patrimonial de nombreux montages en SCI.
Elle pourrait influencer d’autres contentieux, bien que sa portée reste limitée. Contrairement à l’abus de droit classique, où l’administration doit prouver l’intention fiscale, c’est ici au contribuable de démontrer la légitimité de son objectif.
La Direction régionale des finances publiques dispose jusqu’à début novembre pour faire appel. En attendant, cette décision marque une étape importante dans la définition des frontières entre optimisation et abus fiscal.